Conspiracy Watch | l'Observatoire du conspirationnisme
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De Sud Radio à TV Libertés, Éric Morillot en eaux complotistes

Passé par Sud Radio et CNews, Éric Morillot fait désormais exploser les compteurs d’audience pour la web-télé d’extrême droite TV Libertés en agrégeant autour de lui identitaires, antivax et pro-Poutine.

Éric Morillot (à gauche) accueilli à TV Libertés par son directeur Martial Bild (capture d'écran, septembre 2022).

« Et bien ça y est, nous y sommes ! », s’exclame Éric Morillot le 14 septembre dernier. « C’est le retour de Bistro Libertés. Je suis particulièrement ravi, et honoré surtout, de succéder à l’irremplaçable Martial Bild ». Cadre du Front national pendant près de trente ans avant de co-fonder en 2008 le Parti de la France, soutien d’Éric Zemmour à la présidentielle, Martial Bild dirige la web-télé d’extrême droite TV Libertés où Morillot fait donc sa grande première. « Merci pour ce cadeau que tu me fais, Martial. J’essaierais tout au long de cette année de me montrer, je l’espère, à la hauteur de cette émission que tu as si longtemps incarnée en faisant tout mon possible pour garder intact sa qualité et son succès, sur lequel je n’ai pas besoin de revenir ».

Revenons-y quand même.

TV Libertés (« TVL » pour les intimes) a été fondée en 2014 par Gilles Arnaud, ancien responsable de ProRussiaTV, lui aussi militant au Parti de la France, et Philippe Milliau, ancien dirigeant du Bloc identitaire. Une web-télé très enracinée à l’extrême droite, amplificatrice de propagande russe et de désinformation sur le Covid-19. Fin 2021, l’agence de notation des médias NewsGuard avait classé TVL au 4e rang des 10 mésinformateurs les plus influents, juste derrière les médias d’État russes RT France et Sputnik. Suivi de FranceSoir...

Le « Bistro Libertés », émission qui se targue d’offrir « des débats libres et non conformistes », a toujours été l’un des rendez-vous phare de TVL. Mais depuis la rentrée, Éric Morillot a réussi à élargir significativement son audience : plus de 430 000 vues pour les épisodes avec le financier d’extrême droite Charles Gave et l’avocat Juan Branco, décrit par TVL comme « célèbre défenseur de nos grandes causes : du lanceur d’alertes de Wikileaks Julian Assange, aux antivax, en passant par les Gilets Jaunes ». La barre des 650 000 vues a même été dépassée avec l’invitation d’André Bercoff (Sud Radio) et le hâbleur conspirationniste Idriss Aberkane. Dernier invité en date : Philippe de Villiers, qui s’est félicité d’être ainsi reçu par « une des voix de la France libre ».

Pour animer ces « débats », Morillot s’est entouré de chroniqueurs tout aussi modérés : Greg Tabibian, youtubeur amateur de « blagues » antisémites et de Dieudonné ; Pierre Gentillet, avocat chroniqueur régulier sur CNews et membre du dialogue franco-russe de l’eurodéputé RN Thierry Mariani ; Mike Borowski, ancien taulier du blog d'extrême droite LaGaucheM'aTuer et désormais animateur de la chaîne YouTube « Géopolitique profonde » ; ou encore Gabrielle Cluzel, directrice de Boulevard Voltaire, un site condamné en 2014 pour provocation à la haine raciale.

Côté « gauche », Morillot a fait appel à Alexis Poulin, ancien chroniqueur de la web-télé insoumise Le Média, éditorialiste chez Sud Radio, déjà vu sur TV Libertés et toujours invité sur RT France malgré son interdiction de diffusion en Europe. À ses côtés, Didier Maïsto, ancien patron de Sud Radio, ex-animateur sur RT France, figure du mouvement des Gilets jaunes et soutien de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle.

Chacun vient apporter à l’émission l'audience – conséquente – qu'il s'est préalablement constitué au fil du temps sur les réseaux sociaux et contribue à « faire exploser les compteurs YouTube » du « Bistro ». Ou comment fabriquer une véritable chambre d’écho complotiste et identitaire.

La part du lion pour l’extrême droite

Mais le pluralisme n'est qu'apparent, la petite troupe s’accordant en effet sur l’essentiel : « pulvériser » la « bien-pensance » des médias « mainstream » supposément inféodés au « système ». Sans oublier bien sûr de semer de temps à autre la panique au sujet du « Grand Remplacement » et du « génocide du peuple français ». Le tout avec Éric Morillot en chef d’un orchestre où chacun tente de jouer du pipeau plus fort que son voisin, sous des tonnerres d’applaudissements.

Sa partition, Morillot la répète depuis un an sur sa propre chaîne YouTube, où il génère encore plus d’audience avec « Les Incorrectibles ». Une reprise de l’émission qu’il animait auparavant sur Sud Radio mais qui n’a pas été renouvelée à la rentrée 2021. Les invités de celui qui a aussi été chroniqueur pour CNews ressemblent pourtant à s’y méprendre à ceux qui sont restés les bienvenus chez ses anciens employeurs. Le propagandiste pro-Kremlin Adrien Bocquet – dont les grossiers canulars diffusés à plusieurs reprises chez André Bercoff ont été démontés par CheckNews – a par exemple été reçu en mai dernier sur le canapé orange d’Éric Morillot pour relater les crimes supposés des « néo-nazis » ukrainiens auxquels il aurait assisté à Boutcha – ville martyre où il n’a en réalité jamais mis les pieds.

Le mois précédent, sur le même canapé, la place était occupée par l’activiste panafricaniste (et antisémite) franco-béninois Kémi Séba, l’un des principaux propagandistes du Kremlin en Afrique et dont l'avocat n'est autre que Juan Branco. Toujours au rayon Poutine, la chaîne avait aussi reçu Pierre Gentillet, en juin, avant qu’il ne devienne chroniqueur de « Bistro Libertés ».

La diversification est tout de même de mise, avec une large place accordée aux antivax et aux diffuseurs de désinformation sur le Covid-19 comme Louis Fouché, Florian Philippot, Fabrice Di Vizio ou, déjà, Idriss Aberkane. Mais c’est bien l’extrême droite qui s’y taille la part du lion avec plus d’un tiers des invitations, parmi lesquelles Charles Gave, Éric Zemmour, Laurent Obertone, Jean Messiha, Marion Maréchal ou encore Baptiste Marchais. Morillot s’est même fendu d’une invitation de Martial Bild, fin octobre. Un entretien avec celui qui n’est donc nul autre que son patron à TVL. En toute indépendance naturellement.

De gauche à droite : Didier Maïsto, Alexis Poulin, Juan Branco, Éric Morillot, Greg Tabibian et Pierre Gentillet (capture d'écran, 14/09/2022).

« Les Incorrectibles » ne sont d’ailleurs pas sponsorisés par n’importe qui. Depuis janvier, Éric Morillot peut financer son programme grâce au soutien de Gettr, réseau social fondé par l’ex porte-parole de Donald Trump, Jason Miller. Morillot l’avait reçu un mois plus tôt [EDIT : suite à la publication de cet article, ce dernier a assuré sur Twitter que le partenariat avec Gettr avait été rompu en avril ; Conspiracy Watch se borne à constater qu'en mai 2022, son émission est encore présentée par Gettr...]. Terre de France et Kalos, marques « made in France » financeuses d’influenceurs de la fachosphère, ont également rejoint la liste des soutiens de l'émission.

On ne peut plus rien dire !

En octobre 2021, Éric Morillot décrivait sa démarche sur la web-TV complotiste Putsch fondée par Nicolas Vidal, lui-même ancien chroniqueur de RT France, des « Incorrectibles » sur Sud Radio et éditorialiste sur la radio d’extrême droite Radio Courtoisie. Morillot revendique de vouloir « s’engager » dans le débat politique et d’inviter avant tout des « grandes gueules » qui se trouveraient aujourd’hui plus facilement « du côté d'Éric Zemmour, de Marine Le Pen et de Jean-Luc Mélenchon » selon lui.

En réponse aux critiques parfois émises sur ses invités, l’ex de Sud Radio déclare alors : « il est sidérant que dans certains médias il y a une forme de censure qui soit revenue », et tient à préciser que « quand on interviewe quelqu'un ça ne veut pas dire qu'on partage ses opinions ! ». Conspiracy Watch a d’ailleurs contacté Éric Morillot pour lui poser quelques questions : « Je ne réponds à aucun organisme militant ou partisan » (sic), nous-a-t-il rétorqué par mail, « hormis sur Twitter qui est l’espace d’expression pour cela ».

Pas nécessairement en accord avec ses invités, Éric Morillot ? À voir. En juillet le Suisse Jacques Baud, vu lui aussi sur RT France, lâche dans « Les Incorrectibles » que, contrairement à ce que prétendent les « médias au service de la propagande ukrainienne », Poutine n’aurait jamais voulu capturer Kiev ni même prendre le contrôle de l’Ukraine, mais simplement la « démilitariser ». Soit le discours officiel du Kremlin. Morillot acquiesce et enchaîne : « Vous êtes – comme nous ici assez souvent aux Incorrectibles – régulièrement traité de complotiste et de conspirationniste et j'en passe. Est-ce que ces qualificatifs, ces attaques, ça vous touche ? ». Ce à quoi Jacques Baud répond : « Ceux qui m’ont traité de conspirationniste [il mentionne notamment Conspiracy Watch – ndlr] sont payés par l’étranger ». Pour un ancien officier des services de renseignements, Baud est mal renseigné, Conspiracy Watch n'étant pas et n'ayant jamais été « payé par l'étranger ».

Autre exemple, le 30 octobre dernier, avec l’infectiologue Christian Perronne, figure du covido-complotisme, propagateur de fausses informations et grand promoteur de l’hydroxychloroquine.

« Vous croyez vraiment, cher Christian […] qu’il s’agit d’un complot mondial ? », lui demande Morillot en parlant de la pandémie de Covid-19. « Il y avait beaucoup de symboles du coronavirus aux Jeux olympiques de Londres. Avant il y avait des vidéos qui circulaient. Il y avait la couverture de The Economist en janvier 2019 qui annonçait la pandémie avec le pangolin, il y avait tous les symboles de la pandémie, le QR code, l’ADN injecté dans le bras, ou l’ARN. C’était déjà annoncé à l’avance ». Un passage visible sur la plateforme Utreon, également partenaire de l’émission, mais coupé de la version publiée sur YouTube. Histoire d'échapper aux fourches caudines de la modération ?

« Certains vont vous dire que c’est un malheureux hasard », relance Morillot avant de demander à Perronne si « Bill Gates a un rôle » dans ce grand complot. Pas plus de répondant quand son invité affirme, en dépit de toutes les preuves du contraire, qu’il est « démontré » que les vaccins n’ont jamais été efficaces. Mais le but est-il d'informer le public ?

 

(Dernière mise à jour le 26/11/2022 : ajout d'une précision concernant le partenariat avec Gettr)

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Éric Morillot (à gauche) accueilli à TV Libertés par son directeur Martial Bild (capture d'écran, septembre 2022).

« Et bien ça y est, nous y sommes ! », s’exclame Éric Morillot le 14 septembre dernier. « C’est le retour de Bistro Libertés. Je suis particulièrement ravi, et honoré surtout, de succéder à l’irremplaçable Martial Bild ». Cadre du Front national pendant près de trente ans avant de co-fonder en 2008 le Parti de la France, soutien d’Éric Zemmour à la présidentielle, Martial Bild dirige la web-télé d’extrême droite TV Libertés où Morillot fait donc sa grande première. « Merci pour ce cadeau que tu me fais, Martial. J’essaierais tout au long de cette année de me montrer, je l’espère, à la hauteur de cette émission que tu as si longtemps incarnée en faisant tout mon possible pour garder intact sa qualité et son succès, sur lequel je n’ai pas besoin de revenir ».

Revenons-y quand même.

TV Libertés (« TVL » pour les intimes) a été fondée en 2014 par Gilles Arnaud, ancien responsable de ProRussiaTV, lui aussi militant au Parti de la France, et Philippe Milliau, ancien dirigeant du Bloc identitaire. Une web-télé très enracinée à l’extrême droite, amplificatrice de propagande russe et de désinformation sur le Covid-19. Fin 2021, l’agence de notation des médias NewsGuard avait classé TVL au 4e rang des 10 mésinformateurs les plus influents, juste derrière les médias d’État russes RT France et Sputnik. Suivi de FranceSoir...

Le « Bistro Libertés », émission qui se targue d’offrir « des débats libres et non conformistes », a toujours été l’un des rendez-vous phare de TVL. Mais depuis la rentrée, Éric Morillot a réussi à élargir significativement son audience : plus de 430 000 vues pour les épisodes avec le financier d’extrême droite Charles Gave et l’avocat Juan Branco, décrit par TVL comme « célèbre défenseur de nos grandes causes : du lanceur d’alertes de Wikileaks Julian Assange, aux antivax, en passant par les Gilets Jaunes ». La barre des 650 000 vues a même été dépassée avec l’invitation d’André Bercoff (Sud Radio) et le hâbleur conspirationniste Idriss Aberkane. Dernier invité en date : Philippe de Villiers, qui s’est félicité d’être ainsi reçu par « une des voix de la France libre ».

Pour animer ces « débats », Morillot s’est entouré de chroniqueurs tout aussi modérés : Greg Tabibian, youtubeur amateur de « blagues » antisémites et de Dieudonné ; Pierre Gentillet, avocat chroniqueur régulier sur CNews et membre du dialogue franco-russe de l’eurodéputé RN Thierry Mariani ; Mike Borowski, ancien taulier du blog d'extrême droite LaGaucheM'aTuer et désormais animateur de la chaîne YouTube « Géopolitique profonde » ; ou encore Gabrielle Cluzel, directrice de Boulevard Voltaire, un site condamné en 2014 pour provocation à la haine raciale.

Côté « gauche », Morillot a fait appel à Alexis Poulin, ancien chroniqueur de la web-télé insoumise Le Média, éditorialiste chez Sud Radio, déjà vu sur TV Libertés et toujours invité sur RT France malgré son interdiction de diffusion en Europe. À ses côtés, Didier Maïsto, ancien patron de Sud Radio, ex-animateur sur RT France, figure du mouvement des Gilets jaunes et soutien de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle.

Chacun vient apporter à l’émission l'audience – conséquente – qu'il s'est préalablement constitué au fil du temps sur les réseaux sociaux et contribue à « faire exploser les compteurs YouTube » du « Bistro ». Ou comment fabriquer une véritable chambre d’écho complotiste et identitaire.

La part du lion pour l’extrême droite

Mais le pluralisme n'est qu'apparent, la petite troupe s’accordant en effet sur l’essentiel : « pulvériser » la « bien-pensance » des médias « mainstream » supposément inféodés au « système ». Sans oublier bien sûr de semer de temps à autre la panique au sujet du « Grand Remplacement » et du « génocide du peuple français ». Le tout avec Éric Morillot en chef d’un orchestre où chacun tente de jouer du pipeau plus fort que son voisin, sous des tonnerres d’applaudissements.

Sa partition, Morillot la répète depuis un an sur sa propre chaîne YouTube, où il génère encore plus d’audience avec « Les Incorrectibles ». Une reprise de l’émission qu’il animait auparavant sur Sud Radio mais qui n’a pas été renouvelée à la rentrée 2021. Les invités de celui qui a aussi été chroniqueur pour CNews ressemblent pourtant à s’y méprendre à ceux qui sont restés les bienvenus chez ses anciens employeurs. Le propagandiste pro-Kremlin Adrien Bocquet – dont les grossiers canulars diffusés à plusieurs reprises chez André Bercoff ont été démontés par CheckNews – a par exemple été reçu en mai dernier sur le canapé orange d’Éric Morillot pour relater les crimes supposés des « néo-nazis » ukrainiens auxquels il aurait assisté à Boutcha – ville martyre où il n’a en réalité jamais mis les pieds.

Le mois précédent, sur le même canapé, la place était occupée par l’activiste panafricaniste (et antisémite) franco-béninois Kémi Séba, l’un des principaux propagandistes du Kremlin en Afrique et dont l'avocat n'est autre que Juan Branco. Toujours au rayon Poutine, la chaîne avait aussi reçu Pierre Gentillet, en juin, avant qu’il ne devienne chroniqueur de « Bistro Libertés ».

La diversification est tout de même de mise, avec une large place accordée aux antivax et aux diffuseurs de désinformation sur le Covid-19 comme Louis Fouché, Florian Philippot, Fabrice Di Vizio ou, déjà, Idriss Aberkane. Mais c’est bien l’extrême droite qui s’y taille la part du lion avec plus d’un tiers des invitations, parmi lesquelles Charles Gave, Éric Zemmour, Laurent Obertone, Jean Messiha, Marion Maréchal ou encore Baptiste Marchais. Morillot s’est même fendu d’une invitation de Martial Bild, fin octobre. Un entretien avec celui qui n’est donc nul autre que son patron à TVL. En toute indépendance naturellement.

De gauche à droite : Didier Maïsto, Alexis Poulin, Juan Branco, Éric Morillot, Greg Tabibian et Pierre Gentillet (capture d'écran, 14/09/2022).

« Les Incorrectibles » ne sont d’ailleurs pas sponsorisés par n’importe qui. Depuis janvier, Éric Morillot peut financer son programme grâce au soutien de Gettr, réseau social fondé par l’ex porte-parole de Donald Trump, Jason Miller. Morillot l’avait reçu un mois plus tôt [EDIT : suite à la publication de cet article, ce dernier a assuré sur Twitter que le partenariat avec Gettr avait été rompu en avril ; Conspiracy Watch se borne à constater qu'en mai 2022, son émission est encore présentée par Gettr...]. Terre de France et Kalos, marques « made in France » financeuses d’influenceurs de la fachosphère, ont également rejoint la liste des soutiens de l'émission.

On ne peut plus rien dire !

En octobre 2021, Éric Morillot décrivait sa démarche sur la web-TV complotiste Putsch fondée par Nicolas Vidal, lui-même ancien chroniqueur de RT France, des « Incorrectibles » sur Sud Radio et éditorialiste sur la radio d’extrême droite Radio Courtoisie. Morillot revendique de vouloir « s’engager » dans le débat politique et d’inviter avant tout des « grandes gueules » qui se trouveraient aujourd’hui plus facilement « du côté d'Éric Zemmour, de Marine Le Pen et de Jean-Luc Mélenchon » selon lui.

En réponse aux critiques parfois émises sur ses invités, l’ex de Sud Radio déclare alors : « il est sidérant que dans certains médias il y a une forme de censure qui soit revenue », et tient à préciser que « quand on interviewe quelqu'un ça ne veut pas dire qu'on partage ses opinions ! ». Conspiracy Watch a d’ailleurs contacté Éric Morillot pour lui poser quelques questions : « Je ne réponds à aucun organisme militant ou partisan » (sic), nous-a-t-il rétorqué par mail, « hormis sur Twitter qui est l’espace d’expression pour cela ».

Pas nécessairement en accord avec ses invités, Éric Morillot ? À voir. En juillet le Suisse Jacques Baud, vu lui aussi sur RT France, lâche dans « Les Incorrectibles » que, contrairement à ce que prétendent les « médias au service de la propagande ukrainienne », Poutine n’aurait jamais voulu capturer Kiev ni même prendre le contrôle de l’Ukraine, mais simplement la « démilitariser ». Soit le discours officiel du Kremlin. Morillot acquiesce et enchaîne : « Vous êtes – comme nous ici assez souvent aux Incorrectibles – régulièrement traité de complotiste et de conspirationniste et j'en passe. Est-ce que ces qualificatifs, ces attaques, ça vous touche ? ». Ce à quoi Jacques Baud répond : « Ceux qui m’ont traité de conspirationniste [il mentionne notamment Conspiracy Watch – ndlr] sont payés par l’étranger ». Pour un ancien officier des services de renseignements, Baud est mal renseigné, Conspiracy Watch n'étant pas et n'ayant jamais été « payé par l'étranger ».

Autre exemple, le 30 octobre dernier, avec l’infectiologue Christian Perronne, figure du covido-complotisme, propagateur de fausses informations et grand promoteur de l’hydroxychloroquine.

« Vous croyez vraiment, cher Christian […] qu’il s’agit d’un complot mondial ? », lui demande Morillot en parlant de la pandémie de Covid-19. « Il y avait beaucoup de symboles du coronavirus aux Jeux olympiques de Londres. Avant il y avait des vidéos qui circulaient. Il y avait la couverture de The Economist en janvier 2019 qui annonçait la pandémie avec le pangolin, il y avait tous les symboles de la pandémie, le QR code, l’ADN injecté dans le bras, ou l’ARN. C’était déjà annoncé à l’avance ». Un passage visible sur la plateforme Utreon, également partenaire de l’émission, mais coupé de la version publiée sur YouTube. Histoire d'échapper aux fourches caudines de la modération ?

« Certains vont vous dire que c’est un malheureux hasard », relance Morillot avant de demander à Perronne si « Bill Gates a un rôle » dans ce grand complot. Pas plus de répondant quand son invité affirme, en dépit de toutes les preuves du contraire, qu’il est « démontré » que les vaccins n’ont jamais été efficaces. Mais le but est-il d'informer le public ?

 

(Dernière mise à jour le 26/11/2022 : ajout d'une précision concernant le partenariat avec Gettr)

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à propos de l'auteur
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Élie Guckert
Élie Guckert est journaliste indépendant. Il a collaboré avec Mediapart, Disclose, Bellingcat, Slate, Street Press et Conspiracy Watch. Il est l'auteur de Comment Poutine a conquis nos cerveaux, dix ans de propagande russe en France (Plon, 2023).
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