Les accusations de vote truqué et d'élection volée lancées par certains élus LFI après que la chanson de la candidate israélienne s'est hissée à la 2ème place du concours relèvent d’une mécanique bien rodée.
Quand le résultat d’un jeu ou d’un concours n’est pas à la hauteur des attentes, on a toujours la possibilité de dire, sous le coup de la colère et de la frustration, qu’il est truqué. La réaction est simple, enfantine, résonne dans la cour d’école dès la prime enfance. L’éducation s’en mêle alors car il faut apprendre aux mauvais perdants à perdre, comme on apprend aux cavaliers et aux grimpeurs à tomber. Cela fait partie de la discipline, cela fait partie du jeu.
Certains n’apprennent toutefois jamais. Donald Trump n’a pas accepté sa défaite à l’élection présidentielle de 2020 et a répandu la rumeur insistante de l’élection truquée, dont l’une des conséquences tragiques a été l’assaut du Capitole le 6 janvier 2021. Le mauvais perdant aurait dû tomber dans les oubliettes de l’Histoire où devraient figurer tous ceux qui vivent de la post-vérité et par la post-vérité sur le dos de la démocratie libérale. Il n’en a pas été ainsi et celui qui dénonçait la triche chez son concurrent a pu, à coups de fake news relayées par de puissants canaux de désinformation, effectuer un retour en force à la tête de la puissance américaine, sans que ses adversaires ne cherchent à contester sa victoire. Une prime à la triche en quelque sorte.
La France insoumise s’inspire-t-elle de ce modèle métapolitique par l’activité incessante de certains de ses représentants, élus et sympathisants sur les réseaux sociaux, notamment en ce qui concerne la propagande anti-israélienne ? Tout porte à le croire tant il semble qu’un mensonge éhonté diffusé et martelé au bon moment, soit synonyme, aux yeux des dirigeants de ce parti, de gain, à court, moyen ou long terme. Comment expliquer, autrement, que des élus LFI aient tenu à commenter les résultats du concours de l’Eurovision 2025, qui a vu la candidate d’Israël arriver deuxième au classement général, grâce aux points du public ?
Il est vrai que la géopolitique se loge partout et qu’elle n’épargne pas les grandes rencontres internationales, sportives, intellectuelles ou culturelles, défiant souvent des règlements qui proscrivent les manifestations politiques ou religieuses. Yuval Raphael, la candidate israélienne, n’a pas malmené ces règles en interprétant New Day Will Rise, une chanson assurément plus universaliste que belliciste. Mais le seul affichage d’Israël dans la compétition, la seule présence de cette jeune femme de 24 ans, rescapée du massacre du 7 octobre 2023 (elle assistait au festival de musique Nova ce jour-là), ne pouvait qu’ulcérer la famille antisioniste à laquelle appartient LFI. Déjà, à l’été dernier, les obsédés du boycott, qui estiment qu’un peuple comme le peuple israélien doit être tout entier coupable ou ne doit pas être (ce qui revient en l’occurrence au même), contestaient la participation de ses athlètes aux Jeux Olympiques. Le match de football France-Israël le 14 novembre dernier avait aussi inspiré des appels à l'annulation de la part du groupe LFI à l'Assemblée nationale. Cet Eurovision allait donc être celui de la « honte » pour les Insoumis. Il fut plus que cela.
Il fut humiliation. Non pour l’harmonie musicale d'ensemble, qui ne s’en trouva pas martyrisée ; non pour les autres candidats, qui étaient là pour gagner un concours et non la guerre ; non pour la compétition elle-même dont les règles furent respectées ; et certainement pas pour les victimes palestiniennes. Non, la honte et l’humiliation furent celles ressenties par quelques élus LFI et leurs soutiens, convaincus que l’Eurovision, ça sert d’abord à faire la guerre, et probablement qu’Houria Bouteldja avait raison lorsqu’elle avait affirmé, en décembre 2020, lors du concours des Miss France et en référence aux origines de la candidate April Benayoum (Miss Provence, une Française née d’une mère serbo-croate et d’un père italo-israélien), qu’« on ne peut pas être Israélien innocemment ».
Restait à laver l’affront. Ce fut donc la thèse infantile et complotiste de la triche. Tout le monde détestant forcément Israël dans l’univers mental d’une partie des dirigeants LFI, ceux-ci ne pouvaient imaginer que les suffrages du public se porteraient à ce point sur Yuval Raphael. Quand la réalité ne correspond pas aux représentations, alors il faut dénoncer la réalité. Le député Aymeric Caron s’en chargea, accusant Israël, dans un tweet, d’avoir « essayé de voler l’Eurovision » (« après avoir volé la terre des Palestiniens »), puis l'eurodéputée Rima Hassan, qui associa la victoire de l’Israélienne au stéréotype des Juifs et de l’argent avec un « Money, Money, Money », qui n’avait rien d’un hommage à Abba. Dans la nuit du samedi au dimanche, le député Caron, qui ne trouvait pas le sommeil, devait porter l’estocade : « Pendant que les propagandistes d’Israël truquaient le vote à l’Eurovision pour faire gagner leur candidat qui n’avait rien à y faire, leur armée tuait encore des innocents à Gaza. » Quant à Rima Hassan, le dimanche matin, elle criait à nouveau à « la fraude » − avec, en guise de preuve, une capture d'écran datée... de l'année dernière !
Le 19 mai au soir, le directeur de l’Eurovision a définitivement rejoint le camp des « génocidaires » en bottant en touche les allégations de fraude et la suspicion de certaines chaînes publiques (notamment espagnoles et belges), expliquant que le système de vote utilisé « est considéré comme l’un des plus sophistiqués au monde ». Il y a peu de chance que les détails techniques fournis suffisent à convaincre ceux qui refusent un verdict où se lit, assez sûrement, de la sympathie pour Israël. Une sympathie qui ne signifie ni indifférence à l’égard des victimes palestiniennes ni soutien inconditionnel à la politique du gouvernement Netanyahou. Un témoignage qui souligne simplement que la conscience de la complexité géopolitique peut se donner à lire à l’occasion d’un scrutin populaire. Cette leçon aura certainement échappé à la brigade anti-fraude insoumise, plus soucieuse de répression que de vérité, et à tous ceux pour qui les Israéliens et leurs amis ont la triche dans le sang.
Voir aussi :
Quand le résultat d’un jeu ou d’un concours n’est pas à la hauteur des attentes, on a toujours la possibilité de dire, sous le coup de la colère et de la frustration, qu’il est truqué. La réaction est simple, enfantine, résonne dans la cour d’école dès la prime enfance. L’éducation s’en mêle alors car il faut apprendre aux mauvais perdants à perdre, comme on apprend aux cavaliers et aux grimpeurs à tomber. Cela fait partie de la discipline, cela fait partie du jeu.
Certains n’apprennent toutefois jamais. Donald Trump n’a pas accepté sa défaite à l’élection présidentielle de 2020 et a répandu la rumeur insistante de l’élection truquée, dont l’une des conséquences tragiques a été l’assaut du Capitole le 6 janvier 2021. Le mauvais perdant aurait dû tomber dans les oubliettes de l’Histoire où devraient figurer tous ceux qui vivent de la post-vérité et par la post-vérité sur le dos de la démocratie libérale. Il n’en a pas été ainsi et celui qui dénonçait la triche chez son concurrent a pu, à coups de fake news relayées par de puissants canaux de désinformation, effectuer un retour en force à la tête de la puissance américaine, sans que ses adversaires ne cherchent à contester sa victoire. Une prime à la triche en quelque sorte.
La France insoumise s’inspire-t-elle de ce modèle métapolitique par l’activité incessante de certains de ses représentants, élus et sympathisants sur les réseaux sociaux, notamment en ce qui concerne la propagande anti-israélienne ? Tout porte à le croire tant il semble qu’un mensonge éhonté diffusé et martelé au bon moment, soit synonyme, aux yeux des dirigeants de ce parti, de gain, à court, moyen ou long terme. Comment expliquer, autrement, que des élus LFI aient tenu à commenter les résultats du concours de l’Eurovision 2025, qui a vu la candidate d’Israël arriver deuxième au classement général, grâce aux points du public ?
Il est vrai que la géopolitique se loge partout et qu’elle n’épargne pas les grandes rencontres internationales, sportives, intellectuelles ou culturelles, défiant souvent des règlements qui proscrivent les manifestations politiques ou religieuses. Yuval Raphael, la candidate israélienne, n’a pas malmené ces règles en interprétant New Day Will Rise, une chanson assurément plus universaliste que belliciste. Mais le seul affichage d’Israël dans la compétition, la seule présence de cette jeune femme de 24 ans, rescapée du massacre du 7 octobre 2023 (elle assistait au festival de musique Nova ce jour-là), ne pouvait qu’ulcérer la famille antisioniste à laquelle appartient LFI. Déjà, à l’été dernier, les obsédés du boycott, qui estiment qu’un peuple comme le peuple israélien doit être tout entier coupable ou ne doit pas être (ce qui revient en l’occurrence au même), contestaient la participation de ses athlètes aux Jeux Olympiques. Le match de football France-Israël le 14 novembre dernier avait aussi inspiré des appels à l'annulation de la part du groupe LFI à l'Assemblée nationale. Cet Eurovision allait donc être celui de la « honte » pour les Insoumis. Il fut plus que cela.
Il fut humiliation. Non pour l’harmonie musicale d'ensemble, qui ne s’en trouva pas martyrisée ; non pour les autres candidats, qui étaient là pour gagner un concours et non la guerre ; non pour la compétition elle-même dont les règles furent respectées ; et certainement pas pour les victimes palestiniennes. Non, la honte et l’humiliation furent celles ressenties par quelques élus LFI et leurs soutiens, convaincus que l’Eurovision, ça sert d’abord à faire la guerre, et probablement qu’Houria Bouteldja avait raison lorsqu’elle avait affirmé, en décembre 2020, lors du concours des Miss France et en référence aux origines de la candidate April Benayoum (Miss Provence, une Française née d’une mère serbo-croate et d’un père italo-israélien), qu’« on ne peut pas être Israélien innocemment ».
Restait à laver l’affront. Ce fut donc la thèse infantile et complotiste de la triche. Tout le monde détestant forcément Israël dans l’univers mental d’une partie des dirigeants LFI, ceux-ci ne pouvaient imaginer que les suffrages du public se porteraient à ce point sur Yuval Raphael. Quand la réalité ne correspond pas aux représentations, alors il faut dénoncer la réalité. Le député Aymeric Caron s’en chargea, accusant Israël, dans un tweet, d’avoir « essayé de voler l’Eurovision » (« après avoir volé la terre des Palestiniens »), puis l'eurodéputée Rima Hassan, qui associa la victoire de l’Israélienne au stéréotype des Juifs et de l’argent avec un « Money, Money, Money », qui n’avait rien d’un hommage à Abba. Dans la nuit du samedi au dimanche, le député Caron, qui ne trouvait pas le sommeil, devait porter l’estocade : « Pendant que les propagandistes d’Israël truquaient le vote à l’Eurovision pour faire gagner leur candidat qui n’avait rien à y faire, leur armée tuait encore des innocents à Gaza. » Quant à Rima Hassan, le dimanche matin, elle criait à nouveau à « la fraude » − avec, en guise de preuve, une capture d'écran datée... de l'année dernière !
Le 19 mai au soir, le directeur de l’Eurovision a définitivement rejoint le camp des « génocidaires » en bottant en touche les allégations de fraude et la suspicion de certaines chaînes publiques (notamment espagnoles et belges), expliquant que le système de vote utilisé « est considéré comme l’un des plus sophistiqués au monde ». Il y a peu de chance que les détails techniques fournis suffisent à convaincre ceux qui refusent un verdict où se lit, assez sûrement, de la sympathie pour Israël. Une sympathie qui ne signifie ni indifférence à l’égard des victimes palestiniennes ni soutien inconditionnel à la politique du gouvernement Netanyahou. Un témoignage qui souligne simplement que la conscience de la complexité géopolitique peut se donner à lire à l’occasion d’un scrutin populaire. Cette leçon aura certainement échappé à la brigade anti-fraude insoumise, plus soucieuse de répression que de vérité, et à tous ceux pour qui les Israéliens et leurs amis ont la triche dans le sang.
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