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Zemmour et le complot féministe contre Tariq Ramadan

Publié par La Rédaction06 octobre 2021

Dans son dernier livre, le potentiel futur candidat à l'élection présidentielle Eric Zemmour se dit convaincu que Tariq Ramadan a été piégé...

Eric Zemmour et Tariq Ramadan sur le plateau d'« On n'est pas couché » (capture d'écran YouTube ; France 2, 26/09/2009).

Le dernier ouvrage d’Eric Zemmour, La France n’a pas dit son dernier mot, s’est vendu à près de 80 000 exemplaires en une semaine. Le polémiste s’interroge dès les premières lignes sur une future entrée en politique, avec pour source d’inspiration les regrets du journaliste maurassien Jacques Bainville, membre de l’Action Française : « J’ai toujours eu tort de ne pas viser assez haut ! »

Un chapitre détonne cependant avec l’ensemble du livre au propos très nationaliste. Intitulé « Frères ennemis », Eric Zemmour y décrit en quelques pages un déjeuner en compagnie de Tariq Ramadan en janvier 2012. A l’initiative d’Eric Naulleau, la rencontre hors plateaux télé a lieu dans un restaurant asiatique chic de Paris. L’ambiance de la rencontre est selon ses propres mots « décontractée », « les vapeurs de crevettes et les soles à la sauce caramel sont avalées sous les rires », avec un Tariq Ramadan « souriant et avenant ». Au-delà de la complaisance, voire de la fascination, envers un prédicateur issu des Frères musulmans, Eric Zemmour assume quelques paragraphes plus tard prendre fait et cause pour Tariq Ramadan lorsqu’il est accusé de viol en 2017. « Ennemi » politique, mais surtout « frère » dans la misogynie... jusqu’à partager sa vision complotiste de la justice et des médias. Extrait :

« J’ai suivi depuis lors comme n’importe qui ses ennuis judiciaires. Je ne sais rien de cette histoire, mais je demeure convaincu qu’il est tombé dans un piège […]. C’est cette fameuse notion "d’emprise", dernière trouvaille des féministes pour criminaliser l’homme, bourreau éternel, sans se rendre compte, dans leur hargne vindicative, que leur définition de l’"emprise" et ses effets pervers ressemble comme une sœur à ce qu’on appelait jadis dans les romans et les chansons populaires les "affres de l’amour". J’ai eu un choc lorsque j’ai aperçu Ramadan sur mon écran de télévision, à sa sortie de prison, les cheveux blanchis, la mine défaite, la voix cassée d’un vieillard. Il répondait sur BFM TV aux questions d’un Jean-Jacques Bourdin qui, pour se faire pardonner son invitation du "monstre" auprès de la caste médiatique, en rajoutait dans l’ignominie, lui posant des questions d’une vulgarité indécente […]. Je considère Tariq Ramadan comme un adversaire idéologique, et même comme un ennemi de ma patrie puisque son projet est l’islamisation de la France. Mais je ne combats pas mes ennemis avec les armes de la guérilla judiciaire ou de troubles affaires de mœurs ».

Ainsi l’« emprise » – doux euphémisme pour décrire des cas de violences sexuelles – serait-elle « la dernière trouvaille des féministes » pour criminaliser les hommes ? Reste qu'à ce jour, la justice n’a toujours pas évoqué de complot de féministes contre Tariq Ramadan qui fait face à pas moins de cinq mises en examen pour viols. Eric Zemmour assume : un « piège » aurait été tendu à Tariq Ramadan.

Cette prise de position du polémiste en faveur d’une manipulation contre le prédicateur islamiste rappelle celles issues… de la mouvance décoloniale. En avril 2020, sur Médiapart, un « appel international pour le Professeur Tariq Ramadan » adressé à la ministre de la Justice Nicole Belloubet exigeait de « mettre un terme immédiat à la mascarade de la justice ». Il était signé cette fois par Houria Bouteldja, François Burgat, Raphaël Confiant, Ramón Grosfoguel ou encore Eric Hazan.

Daniel Zagury, expert psychiatre mandaté par les juges, y était accusé d’être « un membre actif de l’association pro-sioniste Schibboleth, qui s’oppose idéologiquement au Professeur Ramadan » – dans les faits, une association organisant des conférences autour de l'actualité de la pensée de Sigmund Freud. L’agence de presse officielle de la République de Turquie, Anadolu Agency, évoquait de son côté une « conspiration complotée contre Tariq Ramadan avec des motivations explicitement anti-musulmanes [qui] ne vise pas seulement la personnalité d’un seul musulman, mais toute la communauté musulmane de France et d’Europe ». Complot sioniste, complot anti-musulman ou complot féministe ? Chacun choisira en fonction de ses obsessions et de ses inclinations.

 

Voir aussi :

Eric Zemmour sur Vichy : « un rapport manipulatoire à l’histoire »

Le féminisme ? Un « complot sioniste » d’après le guide suprême iranien

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Eric Zemmour et Tariq Ramadan sur le plateau d'« On n'est pas couché » (capture d'écran YouTube ; France 2, 26/09/2009).

Le dernier ouvrage d’Eric Zemmour, La France n’a pas dit son dernier mot, s’est vendu à près de 80 000 exemplaires en une semaine. Le polémiste s’interroge dès les premières lignes sur une future entrée en politique, avec pour source d’inspiration les regrets du journaliste maurassien Jacques Bainville, membre de l’Action Française : « J’ai toujours eu tort de ne pas viser assez haut ! »

Un chapitre détonne cependant avec l’ensemble du livre au propos très nationaliste. Intitulé « Frères ennemis », Eric Zemmour y décrit en quelques pages un déjeuner en compagnie de Tariq Ramadan en janvier 2012. A l’initiative d’Eric Naulleau, la rencontre hors plateaux télé a lieu dans un restaurant asiatique chic de Paris. L’ambiance de la rencontre est selon ses propres mots « décontractée », « les vapeurs de crevettes et les soles à la sauce caramel sont avalées sous les rires », avec un Tariq Ramadan « souriant et avenant ». Au-delà de la complaisance, voire de la fascination, envers un prédicateur issu des Frères musulmans, Eric Zemmour assume quelques paragraphes plus tard prendre fait et cause pour Tariq Ramadan lorsqu’il est accusé de viol en 2017. « Ennemi » politique, mais surtout « frère » dans la misogynie... jusqu’à partager sa vision complotiste de la justice et des médias. Extrait :

« J’ai suivi depuis lors comme n’importe qui ses ennuis judiciaires. Je ne sais rien de cette histoire, mais je demeure convaincu qu’il est tombé dans un piège […]. C’est cette fameuse notion "d’emprise", dernière trouvaille des féministes pour criminaliser l’homme, bourreau éternel, sans se rendre compte, dans leur hargne vindicative, que leur définition de l’"emprise" et ses effets pervers ressemble comme une sœur à ce qu’on appelait jadis dans les romans et les chansons populaires les "affres de l’amour". J’ai eu un choc lorsque j’ai aperçu Ramadan sur mon écran de télévision, à sa sortie de prison, les cheveux blanchis, la mine défaite, la voix cassée d’un vieillard. Il répondait sur BFM TV aux questions d’un Jean-Jacques Bourdin qui, pour se faire pardonner son invitation du "monstre" auprès de la caste médiatique, en rajoutait dans l’ignominie, lui posant des questions d’une vulgarité indécente […]. Je considère Tariq Ramadan comme un adversaire idéologique, et même comme un ennemi de ma patrie puisque son projet est l’islamisation de la France. Mais je ne combats pas mes ennemis avec les armes de la guérilla judiciaire ou de troubles affaires de mœurs ».

Ainsi l’« emprise » – doux euphémisme pour décrire des cas de violences sexuelles – serait-elle « la dernière trouvaille des féministes » pour criminaliser les hommes ? Reste qu'à ce jour, la justice n’a toujours pas évoqué de complot de féministes contre Tariq Ramadan qui fait face à pas moins de cinq mises en examen pour viols. Eric Zemmour assume : un « piège » aurait été tendu à Tariq Ramadan.

Cette prise de position du polémiste en faveur d’une manipulation contre le prédicateur islamiste rappelle celles issues… de la mouvance décoloniale. En avril 2020, sur Médiapart, un « appel international pour le Professeur Tariq Ramadan » adressé à la ministre de la Justice Nicole Belloubet exigeait de « mettre un terme immédiat à la mascarade de la justice ». Il était signé cette fois par Houria Bouteldja, François Burgat, Raphaël Confiant, Ramón Grosfoguel ou encore Eric Hazan.

Daniel Zagury, expert psychiatre mandaté par les juges, y était accusé d’être « un membre actif de l’association pro-sioniste Schibboleth, qui s’oppose idéologiquement au Professeur Ramadan » – dans les faits, une association organisant des conférences autour de l'actualité de la pensée de Sigmund Freud. L’agence de presse officielle de la République de Turquie, Anadolu Agency, évoquait de son côté une « conspiration complotée contre Tariq Ramadan avec des motivations explicitement anti-musulmanes [qui] ne vise pas seulement la personnalité d’un seul musulman, mais toute la communauté musulmane de France et d’Europe ». Complot sioniste, complot anti-musulman ou complot féministe ? Chacun choisira en fonction de ses obsessions et de ses inclinations.

 

Voir aussi :

Eric Zemmour sur Vichy : « un rapport manipulatoire à l’histoire »

Le féminisme ? Un « complot sioniste » d’après le guide suprême iranien

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