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Un an après le Traité d'Aix-la-Chapelle, l'Alsace et la Lorraine sont toujours françaises

Publié par La Rédaction21 janvier 2020

« Monsieur Macron, tel un Judas, va livrer l’Alsace et la Lorraine [à l'Allemagne] » déclarait l'année dernière un élu souverainiste dans une vidéo relayée sur plusieurs sites conspirationnistes... et par Nicolas Dupont-Aignan.

Carte murale Vidal Lablache n°10, "France frontière Nord-Est et Alsace-Lorraine" (source : Gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France, détail).

Le 22 janvier 2020 marquera, demain, le 57e anniversaire du Traité de l'Elysée ainsi que le premier anniversaire du Traité sur la coopération et l'intégration franco-allemandes.

Signé à Aix-la-Chapelle par Angela Merkel et Emmanuel Macron, ce texte, qui peut être consulté intégralement sur le site du Ministère des affaires étrangères, avait donné lieu, l'année dernière, en pleine crise des Gilets jaunes, à un véritable festival de fausses informations aux relents complotistes.

Dans une vidéo en date du 11 janvier 2019 qui sera effacée sans crier gare quelques jours plus tard, l'eurodéputé Debout la France (DLF) Bernard Monot, un ancien du Front national, affirmait que « Monsieur Macron, tel un Judas, va livrer l’Alsace et la Lorraine à une puissance étrangère » (sic). « Il n’a jamais été mandaté pour engager la France dans une soumission volontaire à l’Allemagne. C’est une haute trahison contre les Français, poursuivait l'élu souverainiste. Et de prédire, dans un élan apocalyptique :

« L’Alsace repassera sous régime allemand et la langue administrative sera l’allemand. »

Comme plusieurs médias l'avaient montré (ici, , ou encore ), tout est évidemment faux dans ce discours alarmiste. Le traité d'Aix-la-Chapelle ne prévoit en fait qu’une coopération entre les régions des deux côtés du Rhin, avec la possibilité pour les eurodistricts d’obtenir des dérogations législatives pour entreprendre des projets en commun, dans le strict respect de la Constitution française.

L'intox avait pourtant été relayée par plusieurs sites d'extrême droite comme Résistance républicaine, Riposte laïque et dans des groupes de Gilets jaunes. Nicolas Dupont-Aignan, quant à lui, avait partagé la vidéo de Bernard Monot via son compte YouTube le 15 janvier 2019 avant de l'effacer à son tour deux jours plus tard.

Bernard Monot à propos du traité d'Aix-la-Chapelle (capture d'écran YouTube/Nicolas Dupont Aignan, 15 janvier 2019, réalisée par Antoine Krempf).

Interpellé sur ce point par un journaliste de « Quotidien », le président de DLF s'était dérobé à la question en recourant à un autre mythe sans fondement, l'intention présumée d'Emmanuel Macron de partager le siège de la France à l'ONU avec l'Allemagne :

« Ni Monsieur Trump, ni Monsieur Poutine, ni Madame Theresa May, ni le président chinois ne partagent leur siège à l’ONU et ne demandent le consentement de l’Allemagne. »

Quelques jours plus tôt, sur BFM TV, Marine Le Pen, déclarait elle aussi que le président de la République envisageait, « à terme, de partager notre siège au Conseil de sécurité [de l’ONU] avec l’Allemagne ».

La présidente du Rassemblement national et Nicolas Dupont-Aignan faisaient leur une thèse agitée alors depuis plusieurs semaines par la complosphère souverainiste, plus exactement depuis que le ministre allemand des finances, Olaf Scholz, avait proposé, le 28 novembre 2018, que le siège de membre permanent de la France au Conseil de sécurité soit transformé en siège de l'Union européenne.

Dès le 29 novembre, François Asselineau, de l'Union populaire républicaine (UPR), avait dénoncé une « collaboration implicite de Macron à la demande allemande » au travers de l'« absence répétée de toute réaction française [qui] donne à penser que Paris et Berlin sont secrètement d’accord pour lancer ainsi des "ballons d’essai" afin de voir comment réagissent [...] nos parlementaires et l’opinion publique française ».

Or, comme le relevait Le Monde à l'époque, la proposition de Scholz avait peu de chances d’aboutir. Non seulement la France ne l'a jamais envisagée, mais la perspective d'un partage du siège français au Conseil de sécurité est aussi totalement absente du traité d'Aix-la-Chapelle. Et pour cause : à rebours de tous les fantasmes de soumission à l'Allemagne et de perte d'indépendance nationale, celui-ci avance, dans son article 8 (chapitre « Paix, sécurité et développement »), que « l’admission de la République fédérale de l’Allemagne en tant que membre permanent du conseil de sécurité des Nations unies est une priorité de la diplomatie franco-allemande ». Autrement dit, la France et l'Allemagne militent ensemble pour que Berlin obtienne, à l'instar de la France, un siège de membre permanent au Conseil de sécurité, non pour un siège unique de l'Union européenne qui remplacerait celui de la France – et encore moins pour que la France cède son siège à l'Allemagne !

 

Voir aussi :

Un proche de Thierry Meyssan rejoint les rangs du parti de Nicolas Dupont-Aignan

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« Monsieur Macron, tel un Judas, va livrer l’Alsace et la Lorraine [à l'Allemagne] » déclarait l'année dernière un élu souverainiste dans une vidéo relayée sur plusieurs sites conspirationnistes... et par Nicolas Dupont-Aignan.

Carte murale Vidal Lablache n°10, "France frontière Nord-Est et Alsace-Lorraine" (source : Gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France, détail).

Le 22 janvier 2020 marquera, demain, le 57e anniversaire du Traité de l'Elysée ainsi que le premier anniversaire du Traité sur la coopération et l'intégration franco-allemandes.

Signé à Aix-la-Chapelle par Angela Merkel et Emmanuel Macron, ce texte, qui peut être consulté intégralement sur le site du Ministère des affaires étrangères, avait donné lieu, l'année dernière, en pleine crise des Gilets jaunes, à un véritable festival de fausses informations aux relents complotistes.

Dans une vidéo en date du 11 janvier 2019 qui sera effacée sans crier gare quelques jours plus tard, l'eurodéputé Debout la France (DLF) Bernard Monot, un ancien du Front national, affirmait que « Monsieur Macron, tel un Judas, va livrer l’Alsace et la Lorraine à une puissance étrangère » (sic). « Il n’a jamais été mandaté pour engager la France dans une soumission volontaire à l’Allemagne. C’est une haute trahison contre les Français, poursuivait l'élu souverainiste. Et de prédire, dans un élan apocalyptique :

« L’Alsace repassera sous régime allemand et la langue administrative sera l’allemand. »

Comme plusieurs médias l'avaient montré (ici, , ou encore ), tout est évidemment faux dans ce discours alarmiste. Le traité d'Aix-la-Chapelle ne prévoit en fait qu’une coopération entre les régions des deux côtés du Rhin, avec la possibilité pour les eurodistricts d’obtenir des dérogations législatives pour entreprendre des projets en commun, dans le strict respect de la Constitution française.

L'intox avait pourtant été relayée par plusieurs sites d'extrême droite comme Résistance républicaine, Riposte laïque et dans des groupes de Gilets jaunes. Nicolas Dupont-Aignan, quant à lui, avait partagé la vidéo de Bernard Monot via son compte YouTube le 15 janvier 2019 avant de l'effacer à son tour deux jours plus tard.

Bernard Monot à propos du traité d'Aix-la-Chapelle (capture d'écran YouTube/Nicolas Dupont Aignan, 15 janvier 2019, réalisée par Antoine Krempf).

Interpellé sur ce point par un journaliste de « Quotidien », le président de DLF s'était dérobé à la question en recourant à un autre mythe sans fondement, l'intention présumée d'Emmanuel Macron de partager le siège de la France à l'ONU avec l'Allemagne :

« Ni Monsieur Trump, ni Monsieur Poutine, ni Madame Theresa May, ni le président chinois ne partagent leur siège à l’ONU et ne demandent le consentement de l’Allemagne. »

Quelques jours plus tôt, sur BFM TV, Marine Le Pen, déclarait elle aussi que le président de la République envisageait, « à terme, de partager notre siège au Conseil de sécurité [de l’ONU] avec l’Allemagne ».

La présidente du Rassemblement national et Nicolas Dupont-Aignan faisaient leur une thèse agitée alors depuis plusieurs semaines par la complosphère souverainiste, plus exactement depuis que le ministre allemand des finances, Olaf Scholz, avait proposé, le 28 novembre 2018, que le siège de membre permanent de la France au Conseil de sécurité soit transformé en siège de l'Union européenne.

Dès le 29 novembre, François Asselineau, de l'Union populaire républicaine (UPR), avait dénoncé une « collaboration implicite de Macron à la demande allemande » au travers de l'« absence répétée de toute réaction française [qui] donne à penser que Paris et Berlin sont secrètement d’accord pour lancer ainsi des "ballons d’essai" afin de voir comment réagissent [...] nos parlementaires et l’opinion publique française ».

Or, comme le relevait Le Monde à l'époque, la proposition de Scholz avait peu de chances d’aboutir. Non seulement la France ne l'a jamais envisagée, mais la perspective d'un partage du siège français au Conseil de sécurité est aussi totalement absente du traité d'Aix-la-Chapelle. Et pour cause : à rebours de tous les fantasmes de soumission à l'Allemagne et de perte d'indépendance nationale, celui-ci avance, dans son article 8 (chapitre « Paix, sécurité et développement »), que « l’admission de la République fédérale de l’Allemagne en tant que membre permanent du conseil de sécurité des Nations unies est une priorité de la diplomatie franco-allemande ». Autrement dit, la France et l'Allemagne militent ensemble pour que Berlin obtienne, à l'instar de la France, un siège de membre permanent au Conseil de sécurité, non pour un siège unique de l'Union européenne qui remplacerait celui de la France – et encore moins pour que la France cède son siège à l'Allemagne !

 

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