Ce complotisme est une ligne de défense désespérée, mais qui peut avoir son efficacité, tant les théories du complot sont populaires en ce moment. S’agissant du surgissement des affaires, le premier réflexe de bien des Français (mais aussi de certains journalistes, parmi ceux qui n’ont jamais fait d’enquêtes) s’exprime avec ce genre d’interrogations : « qui a bien pu vouloir nuire ? » ; « Qui a fait fuiter cette affaire ? » ; « qui manipule qui ? ». On peut être un fan de House of Cards (je le suis !) et considérer – quand même – que la plupart des affaires sortent parce que le secret, autour des puissants, (surtout quand ils se rapprochent des plus hautes fonctions) est partagé par beaucoup de monde et qu’il a donc toutes les chances d’être trahi par de simples rouages, beaucoup plus que du fait de complots ourdis en haut lieu.
L’affaire qui touche Bruno Leroux devrait convaincre tout le monde qu’il n’y a pas de complot contre François Fillon ?
Et bien non… c’est le propre du complotisme, réel ou simulé, que de prendre un élément qui démonte l’idée de la machination, pour, au contraire une confirmation du complot… et même de son incroyable subtilité. Certains tordent le raisonnement jusqu’à considérer que François Hollande aurait sacrifié son ministre de l’Intérieur, l’un de ses plus fidèles lieutenants, pour masquer le complot et faire ainsi perdre quelques points à François Fillon. Le communiqué du PS appelant, hier, le candidat Fillon à se retirer donnait aux promoteurs de la théorie du complot un argument supplémentaire ! En fait, en privé, ils ne sont pas nombreux les responsables LR – même proches du candidat – à croire à cette théorie à 12 bandes. Mais c’est sans doute, à un mois du 1er tour, la seule défense possible, aussi absurde soit-elle. Et je sens bien que certains de nos auditeurs se demandent si je ne fais pas preuve d’une grande naïveté ou si je ne fais pas partie de ce complot justement ! Avec vous Patrick. Et vous Dominique, Charline, Alexandra… peut-être même Marie-Pierre Planchon !
Source : France Inter, 23 mars 2017.